Sifflets du Stade de France : comment rendre le sujet (à peu près) intéressant ?

Jeudi matin, comme beaucoup de leurs confrères, les trois journaux gratuits disponibles sur la métropole lilloise (Lille Plus, Métro, 20 Minutes) faisaient leur une sur les sifflets qui ont accompagnés l’équipe de France de football tout au long de son match contre la Tunisie mardi soir (victoire de la France 3-1) et sur la polémique qui s’en est suivie. A cette occasion, chaque journal a fait un choix, qui pose la question suivante : tout article vaut-il vraiment la peine d’être écrit ?

Mardi 14 octobre 2008 vers 20h45, Stade de France, Saint-Denis : la France et la Tunisie pénètrent sur la pelouse. Pour ne pas revivre les incidents survenus ces dernières années contre le Maroc, l’Algérie ou le Portugal, le protocole est bousculé : au lieu de se présenter en deux files indiennes distinctes, les deux équipes entrent mélangées ; les hymnes, quant à eux, sont interprétés par Lââm et Amina, deux chanteuses à la double culture franco-tunisienne. Mais, en dépit des efforts pour faire de ce match amical une fête entre les deux pays, la célébration tourne au vinaigre : la Marseillaise est sifflée par une partie des spectateurs ; l’équipe de France aussi, dès qu’un de ses joueurs touche le cuir.

La réaction ne se fait pas attendre. Dès le lendemain matin, le Premier Ministre François Fillon s’empare de l’affaire et réclame des mesures fortes. Autrement dit, ni plus ni moins que l’arrêt du match lorsque l’hymne national est outragé ! Rien que ça ? Le Président de la République, la Ministre des Sports et son Secrétaire d’Etat y vont également de leur petite déclaration : « Que les ministres du gouvernement quittent le stade si une telle chose se reproduit ! »; « Et pourquoi pas délocaliser les matchs contre les équipes du Maghreb en province, là où ces sauvageons de banlieue ne sont pas ? » Bref, en une journée, tout ce que la France compte de médias et d’hommes politiques s’empare de l’évènement. La crise économique, elle, attendra bien un peu…

Mais revenons-en à ce qui nous préoccupe ici… Si la condamnation de ces sifflets a été unanime dans la presse le lendemain du match, chacun a eu, le jeudi, une manière différente de rebondir sur le sujet et ses derniers développements. Lille Plus, 20 Minutes et Métro ne sont que trois exemples parmi tant d’autres. Mais ces exemples sont, selon moi, caractéristiques : ils illustrent l’éventail des solutions qui étaient offertes aux médias pour traiter cette information. Dans cette perspective, la photo de une a illustré très nettement les choix différents opérés par ces trois quotidiens. Jugez-en par vous-même :

      

Alors, deux jours après, on en est où de cette gueule de bois ?

Personnellement, j’ai tendance à penser que, dans ce cas précis, montrer n’apporte pas de plus à l’information. Ça marque, ça choque, et après ? Après, rien, si ce n’est le désagréable sentiment de se dire qu’on reste dans la dénonciation et que, oui, ces mécréants qui ont osé bafouer l’hymne national ont bien mérité d’être livrés à la vindicte populaire…

Chez Metro, deux jours après, on se remet à peine de son émotion et, du coup, on a encore le cul entre deux chaises : on fait un montage de photos incluant un cliché des délinquants pris en flag’ d’injure à la Marseillaise, mais bon, comme on a dépassé le stade de la colère, on floute les visages (faudrait pas risquer de procès pour atteinte au droit à l’image…). Allez, c’est encore fragile, mais on est sur le bon chemin !

Reste donc 20 Minutes… Là, on semble avoir récupéré… Pas de photo scandaleuse, mais l’image lisse et positive des deux équipés mélangées avant le coup d’envoi. Ah, y’a pas à dire, c’est beau l’amitié, même (surtout ?) quand elle mise est scène ! Allez, et comme on est entre amis, on se permet même un petit jeu de mots !

Bon, plaisanterie mise à part, la vraie différence entre la une de Métro et celle des deux autres gratuits, c’est bien le fait qu’elle s’efforce, par les mots mais surtout par l’image, de sortir de l’émotionnel. Deux jours après les faits, la colère a fait place à la réflexion sur l’événement et à l’analyse de ses conséquences éventuelles. Dans ces conditions, la crise peut bien attendre un peu (mais pas trop non plus !)…

Comments

[Chris]

Et 6 mois après, qu’est-ce qu’on en retient… pas grand-chose ! pour moi c’est un non événement. Je le dirai toujours, ses (pseudo sportifs) supporter de foot ne représentent pas une population quelque soit le comportement.

C’est bien évidemment plus profond… à quand un grand débat sur la crise identitaire des beurs.. ?

Enfin, en attendant… la crise financière à bel et bien été complétée par une crise économique et… sociale ! Alors les crises identitaires ;;! Que faire.. ?